NETTALI.COM - Trois membres d’une même famille ont péri dans un violent incendie déclaré le jeudi dernier au village de Diockoul Diawrigne, dans le département de Kébémer. Ces pertes en vies humaines ont installé une angoisse dans cette localité où les proches des défunts continuent de pleurer ce drame sans précédent.

Visage embué de larmes, la vieille dame pose les deux mains sur sa tête et marmonne à haute voix des mots indéchiffrables. Hurlant à se rompre les cordes vocales, elle s’affale sur une natte posée sous une tente et poursuit de plus belle ses lamentations. Grelottant de tout son corps, comme une feuille morte, elle est subitement entrée en transe. La jeune dame qui cherchait à la calmer s’est précipitée pour lui trouver de l’eau. Aidée par quelques gros bras, elle a ouvert la bouche de la mamie pour l’obliger à prendre quatre (4) gorgées. A peine a-t-elle pris le liquide précieux, qu’elle est entrée dans un sommeil profond. Elle s’est mise à ronfler comme un loir, au grand soulagement de sa fille qui la surveillait pour qu’elle ne se blesse pas dans la mesure où, elle courait dans tous les sens, en tournoyant. En effet, à l’image de cette vieille dame qui était inconsolable, une bonne partie des habitants de Diockoul Diawrigne, chef-lieu de commune, située dans le département de Kébémer, avaient des mines d’enterrement depuis qu’ils ont été informés du drame ayant frappé la famille Fall. En effet, trois (3) membres de cette famille ont péri dans un incendie  tragique.  Il s’agit d’Issa Gaye, âgé d’un an, de sa maman Coumba Fall et d’Amy Soumaré (18 ans). Tous les trois ont succombé à leurs brûlures, causées par l’explosion d’une bonbonne de gaz.

Ce drame familial qui a endeuillé toute une localité, a été pris avec philosophie par Aïdara Fall, grand frère de la jeune dame Coumba Fall. Cet enseignant de formation en service au Cem de Diockoul, essaie  tant que mal à cacher ses sentiments. Les yeux rougis, le débit lent, le gestuel nonchalant, le jeune homme a été trahi par sa voix cassée : «Je suis un homme, je dois faire preuve de sérénité pour éviter d’en rajouter au malheur des femmes, mais force est de constater que ma famille est en train de  traverser des moments sombres. Nous avons perdu, en un claquement de doigts, trois  êtres qui nous ont été très chers…», a déclaré ce chevalier de la craie, avant de dérouler le film du drame qui s’est joué devant lui : «Les faits se sont déroulés jeudi dernier. Cet après-midi là, il était environ 15H passées de quelques minutes quand  ma sœur Coumba Fall s’est retirée dans la véranda pour préparer le  thé. Elle utilisait un réchaud à gaz. Après avoir servi la première tasse aux membres de la famille, elle a commencé la deuxième. Malheureusement pour elle, dès qu’elle ouvre le briquet pour allumer le feu, la bonbonne de gaz a explosé. Codou Fall, sa fille d’un an  et sa nièce Amy Soumaré, qui se  trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment, ont été attaqués par les flammes. Leurs habits ont pris feu. Ma petite sœur, bien qu’elle était en danger, voulait sauver sa fille unique, laquelle a été atrocement brûlée. Lorsque nous avons entendu la détonation, nous nous sommes précipités pour les sauver. Nous leur avons versé du sable pour éteindre le feu qui avait commencé à brûler leur corps.»

Une dizaine de personnes évacuées

«Grièvement blessées, les trois victimes ont été évacuées au centre hospitalier régional Amadou Sakhir Mbaye de Louga, où décéderont Amy Soumaré et Issa Gaye. Coumba Fall qui était la plus touchée, a été acheminée dans une clinique à Dakar, mais malheureusement elle a aussi perdu la vie…», renchérit-il.  Soufflant un peu, Aïdara Fall, visiblement sous le choc, poursuit : «Quand le décès de Coumba Fall m’a  été annoncé, le mercredi aux environs de 19H, je n’avais pas le courage d’informer les membres de ma famille. J’étais conscient qu’ils ne supporteront jamais cette mort de trop. J’avais quitté la maison pour aller me refugier près de l’école primaire. Je ne pouvais pas voir mes proches souffrir sans pour autant pouvoir les soutenir…»

De l’avis de ce jeune enseignant, après que la mort de Coumba Fall a été officiellement rendue publique, tout le village a afflué vers la maison endeuillée. Tout le monde pleurait. D’ailleurs, une dizaine de personnes ont été évacuées au dispensaire de la localité. Certaines parmi elles ont été acheminées au centre de santé de Kébémer, car leur  état de santé s’était beaucoup aggravé à cause du choc qu’elles ont subi. Mame Marième Fall, petite sœur de la défunte Coumba Fall, est elle aussi très touchée par ces pertes en vies humaines qui ont frappé sa famille. Cette élève sage-femme, qui a participé à l’évacuation des blessés vers Louga, peine à contenir son trop plein d’angoisse. "Certes, je n’ai pas peur de la mort, car je suis une sage- femme, mais j’éprouve toutes les peines à chasser de mon esprit l’image de ma grande sœur.  Lorsqu’elle a été internée à l’hôpital de Louga, elle m’appelait souvent pour me demander les nouvelles de sa fille, brûlée elle aussi. Malgré ses douleurs, elle était plutôt préoccupée par la santé de sa fille. D’ailleurs, pour la tranquilliser, je lui disais qu’elle se porte bien, mais le médecin ne voulait pas qu’elle sorte de la salle de soins. Je ne peux manquer de pleurer quand je me rappelle de cette discussion. Notre famille n’oubliera jamais ces pertes cruelles. Perdre en même temps trois membres d’une même famille n’est pas facile d’oublier. Je sais que nous irons vers des lendemains difficiles. Pour le moment, nous supportons ce drame parce que tous les membres de notre famille sont là pour nous prêter main-forte, mais dès qu’ils rentrent chez eux, nous allons commencer à sentir le vide laissé par nos défunts.  Nous prions pour que Dieu les accueille au Paradis. L’espoir  est permis, car Coumba Fall fut une chanteuse religieuse qui faisait les louages du Prophète Seydina Mouhamed (Psl)", témoigne-t-elle.