NETTALI.COM - La chambre administrative de la Cour suprême de Dakar va statuer, le 10 mars prochain, sur l’affaire Ngor Diop, du nom de ce magistrat qui, refusant de libérer un marabout, a été affecté à un autre poste.

Suite à son refus de libérer un marabout, alors qu’il était le président par intérim du Tribunal d’instance de Podor, le magistrat Ngor Diop a été affecté à un autre poste. Un acte qu’il avait jugé illégal et il avait saisi la chambre administrative de la Cour suprême aux fins d’annulation de ladite nomination. La décision sur cette affaire sera rendue le 10 mars prochain. En effet, par décret n°2018-2163 du 12 décembre 2018 portant nomination de présidents par intérim de tribunaux d’instance, pris au visa de nécessités de service sur le rapport présenté par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, après l’avis favorable du Conseil supérieur de la magistrature, en sa réunion du 26 novembre 2018, l’autorité de nomination a affecté monsieur Ngor Diop, Magistrat, alors Conseiller par intérim à la Cour d’appel de Dakar. Il a été affecté pour devenir président par intérim du tribunal d’instance de Podor, intérim dont la durée était fixée à trois ans (décret 2008-2136).

A l’issue de la réunion du Conseil supérieur de la magistrature du 19 mai 2020, maintenu à son poste d’affectation, M. Diop avançait de rang, promu magistrat de premier grade, premier groupe, 4e échelon, indice 3837 (Doc.2-Décisions CSM du 18.05.2020). Le 17 août 2020, il a reçu notification du décret n°2020-1526 du 17 juillet 2020 portant nomination de conseillers de cours d’appel, lequel, au visa de nécessités du service et sur le rapport du garde des Sceaux, ministre de la Justice, après avis favorable du Conseil supérieur de la magistrature en sa consultation à domicile du 10 juillet 2020. Dès lors, il officiait en qualité de conseiller à la Cour d’appel de Thiès, même grade, même indice.

Pour le magistrat comme pour ses conseillers, le décret n°2020-1526 du 17 juillet 2020 est intervenu dans les circonstances suivantes. C’est parce que les 22 et 23 mai 2020, le requérant, chef de juridiction d’instance de Podor, avait placé sous mandat de dépôt monsieur Mamadou Lom, déféré pour des faits de dévastation de récoltes et de menaces simples, de voies de fait ou de violences. Il avait ensuite programmé de juger l’affaire en audience de flagrants délits.

Il a alors reçu des appels du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Louis et du procureur général près la Cour d’appel de Saint-Louis informant du souhait du garde des Sceaux, ministre de la Justice, de voir organiser les conditions diligentes d’une décision de mise en liberté provisoire du mis en cause avant la célébration de la fête de la Korité prévue pour le samedi 23 et le dimanche 24 mai 2020.

Le magistrat a refusé de se plier à cette demande puis, l’affaire enrôlée à la date retenue, il a déclaré le prévenu coupable et l’a condamné à une peine d’emprisonnement assortie de sursis. Il s’en est suivi l’affectation, après consultation à domicile du magistrat, alors que cette affaire ne faisait pas partie de l’ordre du jour, confient à EnQuête des sources autorisées proches du milieu judiciaire.

Dans cette affaire, le requérant, poursuivent ces mêmes sources sous anonymat “soulève l’exception d’inconstitutionnalité de l’alinéa 3 de l’article 6 de la loi organique n°2017-10 du 17 janvier 2017 portant statut des magistrats invoqué au soutien du décret querellé. Ngor Diop et ses conseils évoquent l’article 6 de la loi organique portant statut des magistrats qui dispose : “Les magistrats du siège sont inamovibles ; en dehors des sanctions disciplinaires du 1er degré, ils ne peuvent recevoir une affectation nouvelle, même par voie d’avancement, sans leur consentement préalable, sous réserve des dispositions des articles 90 et suivants de la présente loi organique. Toutefois, lorsque les nécessités du service l’exigent, les magistrats du siège peuvent être provisoirement déplacés par l’autorité de nomination, après avis conforme et motivé du CSM spécifiant lesdites nécessités du service ainsi que la durée du déplacement. Cette durée ne peut en aucun cas excéder trois ans.’’

Le requérant reproche au décret de le déplacer de son poste de président “par intérim’’ du tribunal d’instance de Podor pour l’affecter au poste de conseiller à la Cour d’appel de Thiès et sans spécifier la durée de ce déplacement. Suffisant pour que le magistrat demande l’annulation de ce décret, en ce sens qu’il viole l’article 6 de la loi organique portant statut des magistrats, en ses dispositions relatives à la durée du déplacement d’un magistrat d’un siège. Le même jour, l’affaire opposant le magistrat Souleymane Téliko à l’Etat du Sénégal sera jugée. Le magistrat, actuel Président de chambre à la Cour d’appel de Tambacounda, sera défendu par les avocats Ciré Clédor Ly, Boubacar Koita et Demba Ciré Bathily.