NETTALI.COM - C’est à croire que personne n’apprend des erreurs des autres. " Malgré le vivre-ensemble bien imprégné entre différentes communautés religieuses, certaines transgressions dans l’interprétation de la foi menacent un modèle social sénégalais ou l’intolérance prend de plus en plus de place", commente le journal EnQuête.

Quatre jours ont passé. La douleur est encore là. Les propos de l’imam Serigne Lamine Sall, jeudi 24 février sur les antennes de la télévision Walfadjri, à l’émission “Diiné ak Diamono’’, font toujours aussi mal à la communauté catholique sénégalaise. D’une voix officielle, l’archidiocèse de Dakar, au nom de l’Eglise catholique du Sénégal et du Conseil national du laïcat (CNL) s’en est plaint hier, dans une lettre de protestation adressée au président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA).

Pour des “propos blasphématoires et offensants tenus à l’encontre de la communauté catholique nationale et au-delà’’, celle-ci “exige du respect mutuel et réciproque pour une paix durable’’ à l’encontre d’une communauté qui n’a “fait de tort à personne, ne se prononce pas sur le fondement de la foi des autres’’. Surtout sur les antennes médiatiques où les conséquences de dérives non contrôlées peuvent être très fâcheuses. Car, révèle la lettre de l’archidiocèse de Dakar, il aura fallu “beaucoup d’entregent pour calmer les fidèles chrétiens qui sont en train de s’organiser pour apporter une riposte à la mesure de l’insulte. Celle-ci a été d’assimiler la religion chrétienne à la franc-maçonnerie, avec des propos d’une rare gravité et un amalgame sans précédent. A l’antenne, l’imam Sall a soutenu, dans les propos rapportés, que “quiconque peut entendre chaque dimanche des gens qui disent que Dieu a un fils, ce sont les catholiques, ce ne sont pas des croyants (‘juulit’) ; chaque dimanche, ils vivent dans ce Sénégal. La franc-maçonnerie est une religion, or il y a deux religions, l’islam et les mécréants. Si on peut donc accepter que des mécréants appellent à la prière chaque dimanche et en aient le droit, on peut aussi accepter les francs-maçons, car c’est pareil…’’

“Des fidèles chrétiens prêts à apporter une riposte à la hauteur de l’insulte’’

La méconnaissance et la légèreté avec laquelle l’imam Sall a abordé ce sujet sur le plateau d’une télévision sans être recadré ou interrompu, ont valu la colère de la communauté chrétienne à l’auteur, à la chaîne et à l’animateur. Trois coupables desquels l’archidiocèse de Dakar attend des excuses publiques. Car de tels dérapages interpellent, “musulmans comme chrétiens, en ce sens qu’ils peuvent contribuer à saper notre cohésion nationale’’. Au pays du Ngalax et du dialogue islamo-chrétien, de Léopold Sédar Senghor (premier président chrétien d’un pays pourtant à plus de 99 % de musulmans) ou encore de Barthélemy Dias, nouveau Maire chrétien de Dakar, les amalgames sur la foi catholique ne sont malheureusement pas un fait rare. Malgré le vivre en commun, des alertes menaçant cette cohésion sociale ont été maintes fois répertoriées ces dernières années. Une incompréhension majeure avait abouti à des affrontements entre des fidèles chrétiens et les forces de l’ordre à Dakar, lorsqu’en 2009, le président de la République Abdoulaye Wade avait défendu la construction du monument de la Renaissance africaine, la comparant aux statues que l’on retrouve dans les églises. L’ancien chef de l’Etat avait affirmé, faisant allusion aux chrétiens qu'''ils prient Jésus Christ dans les églises, tout le monde le sait, mais (…) est-ce qu’ils (les imams, NDLR) ont jamais dit de casser les églises ?”.

Des échauffourées avaient alors débuté, après que le cardinal Théodore Adrien Sarr, Archevêque de Dakar, a affirmé, lors de son “message de Nouvel An”, devant des centaines de personnes rassemblées dans la cour du collège de la Cathédrale qu’ils (les chrétiens) se sentaient meurtris et humiliés que “la divinité de Jésus Christ, cœur de notre foi, soit mise en cause et bafouée par la plus haute autorité de l’Etat