NETTALI.COM - Auteur d'un putsch le 24 janvier, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, nouveau président du Burkina Faso qui a prêté serment mercredi, est un soldat de terrain spécialiste de la lutte contre les jihadistes qu'il a combattus dans leurs bastions du nord et de l'est.

Agé de 41 ans, il est aussi l'auteur d'un livre intitulé "Armées ouest-africaines et terrorisme: réponses incertaines?", dans lequel il se montre critique envers les politiques antijihadistes menées dans une région frappée de plein fouet par les groupes armés liés à Al-Qaïda et à l'Etat islamique.

Il y déplore des armées locales trop faibles, aux "tares rédhibitoires", et des partenaires occidentaux "nécessaires" mais "cachottiers".

Depuis sa prise de pouvoir et avant son investiture mercredi par le Conseil constitutionnel, ses apparitions et ses prises de paroles ont été rares, les décisions étant annoncées par communiqués lus à la télévision.

Il ne s'est adressé qu'une fois à la nation burkinabè, le 27 janvier, via une allocution solennelle à la télévision, dans laquelle il a assuré faire de la sécurité sa "priorité".

Les organisations de la société civile comme les syndicats, les partis politiques ou les émissaires ouest-africains qui l'ont rencontré depuis sa prise de pouvoir ont dans l'ensemble salué son ouverture d'esprit.

"C'est l'exemple d'un bon militaire, un bon commandant rigoureux qui est monté au front avec ses hommes", assure une source militaire qui salue aussi son "dévouement".

Lundi, le lieutenant-colonel Damiba s'est rendu dans plusieurs localités du nord du pays à la rencontre des militaires qui se battent au quotidien contre les groupes jihadistes. Un activisme qui tranche avec son prédécesseur Roch Marc Christian Kaboré, dont la population critiquait l'inefficacité face au terrorisme et qui se déplaçait très rarement dans le pays.

- "Des choses dans la tête" -

Le lieutenant-colonel Damiba a été formé à l'Académie militaire Georges Namoano de Po, dans le sud du Burkina Faso, dont la majorité des anciens pensionnaires a servi au sein du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) l'ex-garde rapprochée de Blaise Compaoré, président durant 27 ans, renversé en 2014 après une vague de manifestations.

Damiba a lui-même été commandant de compagnie au RSP de 2003 à 2011, ce qui ne l'avait empêché de s'opposer à la tentative de coup d'Etat fomentée en 2015, contre les autorités de transition d'alors, par le général Gilbert Diendéré, proche de Blaise Compaoré.

C'est en tant que chef de corps de régiment qu'il a eu le plus combattre les groupes armés jihadistes du pays de 2019 à 2021.

Après le massacre en novembre 2021 à Inata (nord) de 53 gendarmes laissés à eux-même,qui avait provoqué un électrochoc au sein des forces armées, il a été nommé commandant à Ouagadougou de la 3e zone militaire couvrant l'est du pays, à la faveur d'un vaste changement des chefs militaires opéré par le président Kaboré.

Le nouvel homme fort du Burkina est également diplômé de l'Ecole militaire de Paris.

"Il fait partie des élites mais a obtenu des résultats sur le terrain, il a dirigé et commandé un certain nombre d’unités", estime l'analyste politique burkinabè Oumarou Paul Koalaga qui ajoute au sujet de la junte: "Ce sont des officiers avec des choses dans la tête".

(AFP)