CONTRIBUTION - La 3e vague de la pandémie à COVID-19, que nous craignions tous, est devenue plus qu’une réalité, mais un véritable drame dans notre pays, le Sénégal. Nul besoin de continuer à spéculer ou à ergoter sur les responsables de cette situation qui nous préoccupe au plus haut point.

Nous les connaissons tous. Le plus important, aujourd’hui, est d’examiner la situation avec lucidité et de proposer des mesures à prendre, en urgence, pour sortir des nombreuses difficultés auxquelles nous sommes confrontés.

  • SITUATION ACTUELLE

1/ Loin d’être une simple vue de l’esprit comme le pensent certains, il faut commencer par admettre que la pandémie à COVID-19 est bel et bien une réalité.

Tant que des gens continueront à faire des conjectures ou un déni de l’existence de l’épidémie, les mesures édictées par les autorités sanitaires ne seront jamais respectées et le virus va continuer à se propager et à opérer à des mutations qui expliquent aujourd’hui, l’apparition de nombreux variants, en particulier, le variant delta qui serait à l’origine de la forte explosion du nombre de nouveaux cas que nous vivons actuellement.

2/ Notre pays a eu, au début de l’épidémie, un bon plan de riposte qui nous avait permis d’obtenir des résultats satisfaisants.

Hélas, nous nous sommes vus trop beaux très tôt et nous avons fait un relâchement à un moment où il fallait maintenir le dispositif de riposte, voire le renforcer, car la pandémie était loin d’être derrière nous.

Les rassemblements, de tous genres, ont repris, les stades et les arènes ont réouvert leurs portes et ont recommencé à recevoir du public, les concerts sont, de nouveau, autorisés, avec des milliers de fans agglutinés les uns contre les autres sans masque, le plus souvent, certains lieux de culte ont également repris leurs rituels.

Au niveau des transports publics, des marchés ou autres « loumas », c’est la catastrophe, avec un non-respect des mesures barrières, en particulier, le port obligatoire de masque, le respect de la distanciation physique et l’usage de solutions hydroalcooliques.

Bref, toutes les dispositions qui nous avaient permis, jusqu’à une époque encore récente, de contenir le virus ont été quasi-abandonnées, avec tout simplement, la présomption, voire la certitude que la COVID-19 était en train d’être éliminée de notre pays.

3/ Notre système de santé, il faut le reconnaitre, a de nombreuses limites, et la pandémie a pu en démontrer les insuffisances dont la correction en profondeur, est devenue, plus qu’une exigence, mais une urgence vitale. Notre personnel de santé est compétent et mérite toute notre reconnaissance pour le lourd travail qu’il a abattu durant cette épreuve. Mais il est fort insuffisant et ne dispose pas de tous les moyens nécessaires pour faire face, convenablement, aux nombreux cas qu’il reçoit.

Les structures d’accueil sont en nombre insuffisant, en particulier, les services de réanimation où toute la logistique nécessaire n’est pas toujours disponible.

4/ Une bonne partie de notre population continue de penser que le vaccin, qui est la seule alternative capable de nous sortir de cette situation, ne présente que des inconvénients et aucun avantage.

Les réseaux sociaux et certains messages qui sont véhiculés ont beaucoup contribué à fonder et à raffermir cet état de pensée. Mais il est important de savoir raison garder.

La vaccination existe depuis la nuit des temps et nous a permis de venir à bout de nombreuses maladies. Rendons grâce et hommage à nos illustres prédécesseurs tels Louis Pasteur et autres qui ont permis à l’humanité de grandir dans de meilleures conditions de santé et d’aspirer à un mieux-être pour se développer.

Que seraient nos enfants s’ils n’étaient pas vaccines dès leur naissance avec les différents programmes qui leur sont dédiés.

Je sais bien qu’il y a un corona-business dont profitent certains pour se faire de l’argent sur le dos de la détresse des malades et de la population.

Je sais également qu’il y a des industries pharmaceutiques promptes à exploiter ce genre de situation pour avoir des dividendes à la limite de l’indécence.

Mais, croyez-moi, aucun scientifique digne de ce nom et là, je pèse bien mes mots, aucun scientifique digne de ce nom, n’ose proposer un vaccin qui n’apporte pas plus de bien que de mal à sa population. Des effets secondaires peuvent apparaître avec l’administration d’un vaccin, comme on peut le voir avec les médicaments que nous consommons régulièrement (Aspirine, Paracétamol, antibiotiques etc…).

Cela est tout à fait compréhensible car il s’agit d’un corps étranger que nous introduisons dans notre organisme.

Mais, si on évalue le rapport bénéfice/risque, il est largement en faveur de la vaccination, d’autant plus que, à l’heure actuelle, c’est la seule issue pour sortir de la situation que nous vivons.

5/ La communication sur la pandémie, également, n’a pas toujours été des meilleures.

Il est vrai que la pandémie n’est pas que sanitaire. Elle a des impacts notoires aux plans économique et social.

Beaucoup de pays vivent actuellement une récession économique importante et il leur faudra de nombreuses années pour s’en relever. A moins qu’il y ait une solidarité de la communauté internationale pour les aider et les accompagner dans un processus de relance.

Mais, quand il y a une épidémie, ce sont les sachants, c’est-à-dire les autorités sanitaires qui doivent être en première ligne pour informer juste et vrai, donner des directives et les mesures à prendre que tout le monde doit respecter.

Maintenant dans l’application correcte et rigoureuse de ces directives et mesures, d’autres structures telles que les forces de sécurité doivent intervenir sans faiblesse, pour assurer leur bonne mise en œuvre.

Dans la stratégie de communication toujours, les conseils et informations des autorités sanitaires doivent bénéficier de relais bien formés pour une bonne dissémination sur l’ensemble du territoire.

Ces relais doivent être des autorités et des porteurs de voix crédibles : chefs religieux, imams, prêtres, les associations sportives et culturelles (ASC), les associations communautaires de base (ACB), les chefs de quartier et de villages, les communicateurs traditionnels, les chefs de familles, etc.

Les enjeux de la pandémie doivent être connus de tous et les mesures idoines appliquées avec soin.

Les chaines de télévision et de radio, la presse écrite et la presse en ligne doivent toutes, être mises à contribution pour transmettre, à feu répétitif, la bonne information sur l’état de la pandémie afin de permettre à tout un chacun d’agir en toute responsabilité.

  • MESURES À PRENDRE

1/ Dans la situation actuelle la première mesure à prendre est de vacciner le plus rapidement possible toute la population sénégalaise en âge de l’être (18 ans révolus). C’est un droit et l’état doit prendre toutes les mesures pour arriver à cette fin, quitte à procéder à des réaménagement et réaffectations budgétaires.

Il s’agit là d’une véritable urgence et il est heureux, aujourd’hui, de constater que beaucoup de Sénégalais qui étaient réticents à la vaccination sont, actuellement, en train de courir derrière le vaccin à cause de la forte recrudescence des nouveaux cas et de la saturation des structures d’accueil.

2/ La stratégie de communication doit être revue et corrigée afin que chaque sénégalais puisse disposer, en tout temps, de la bonne information sur la pandémie, la situation dans notre pays et à travers le monde, les recommandations des autorités sanitaires sur les mesures à observer, en particulier le port obligatoire du masque, le respect de la distanciation physique, le lavage fréquent des mains à l’eau et au savon, l’usage des gels hydroalcooliques, le recours aux structures de sante au moindre signe pour se faire dépister le plus précocement possible, la nécessite d’aller se faire vacciner pour arriver à une immunisation collective et de balayer toutes les fausses informations véhiculées sur le vaccin a travers les réseaux sociaux.

3/ L’autorité de l’état doit s’exercer dans toute sa plénitude. Les mesures édictées par les autorités sanitaires doivent s’appliquer en toute vigueur.

L’exemple doit venir d’en haut pour faciliter l’adhésion de la population. Les rassemblements, quels que soient leurs motivations et leur nature, doivent être interdits et les contrevenants sanctionnes pour servir d’exemple. Les marchés et transports publics doivent être bien surveillés pour vérifier leur conformité avec les mesures préconisées.

4/ Dans les lieux de travail, il faut recourir au télétravail et préférer, à la place des réunions en présentiel, les vidéoconférences. Dans les services à feu continu, il faut procéder à un système de rotation du personnel (turnover).

5/ Enfin, et c’est là le plus important, il faut améliorer notre système de santé en profondeur, avec des hôpitaux de référence dans chaque région, des centres de santé en nombre suffisant avec de bons plateaux techniques, un personnel de santé, également suffisant et bien motivé, des services d’urgence et de réanimation avec toute la logistique nécessaire sur l’ensemble du territoire.

C’est à ce seul et unique prix que nous pourrons, dans l’immédiat, sortir de la situation extrêmement difficile dans laquelle nous nous trouvons, avant de pouvoir, demain, envisager l’émergence.

Docteur El Hadji Amadou DIOP

Médecin du Travail

Conseiller Technique du Directeur General

du Port Autonome de Dakar