NETTALI.COM - L’ex-magistrat Ibrahima Hamidou Dème n’est pas optimiste quant à l’indépendance de la justice. A son avis, il n’y aura jamais d’indépendance tant que la hiérarchie judiciaire ne va pas inspirer les jeunes magistrats.

"La situation de la justice ne peut pas changer parce que les mêmes causes produisent les mêmes effets." L’ex-magistrat Ibrahima Hamidou Dème est formel dans son jugement. Pour lui, "tant qu’il n’y aura pas une volonté politique du président de la République, il n’y aura pas d’indépendance de la justice. Tant que la hiérarchie judiciaire ne va pas inspirer les jeunes magistrats, il n’y aura pas d’indépendance de la justice". Avant d’ajouter : "Le président de la République qui, dans cette même volonté, de réduire l’opposition à sa plus simple expression, réduit aussi la Justice à sa plus simple expression." Il s’ajoute, selon l’ancien magistrat, "à côté, il y a une hiérarchie judiciaire qui s’accommode de cette situation, qui n’inspire pas cette indépendance qui fait l’essence de la magistrature, qui fait l’essence du travail du juge". Donc, malheureusement, conclut-il, "on ne peut pas dans ces conditions-là, avoir l’indépendance dans la magistrature".

Cependant, pour arriver à l’indépendance de la justice, M. Dème considère qu’il faut aussi l’appui de l’opinion publique. Parce que, dit-il, "sans la Justice, il n’y a pas de démocratie. Sans la justice, il n’y a pas de justice sociale, sans la Justice notre pays va péricliter".

Emigration irrégulière

Outre la question de l’indépendance de la Justice, l’invité de la matinale d’Itv a aussi analysé le phénomène de l’émigration irrégulière. A son avis, si les jeunes risquent leur vie, c’est parce qu’ils sont désespérés. "C’est parce qu’ils ne trouvent plus de perspectives sur place, dans leur pays. Ce sont des jeunes qui n’ont pas le minimum pour rester et travailler au Sénégal", justifie-t-il. Aussi pointe-t-il du doigt  "les mauvaises politiques publiques, l’utilisation gabégique des ressources publiques".

Pessimiste, M. Dème pense que malheureusement, il n’y a pas de solutions pour retenir ces jeunes-là.
"Au Sénégal, nous avons un sérieux problème de statistiques et la maladie de la Covid-19 nous a révélé que les statistiques n’étaient pas fiables. C’est parce que les agences sont politisées. C’est pourquoi il y a une sorte d’omerta sur l’émigration clandestine et les conséquences dramatiques.  Il n’y aura pas de statistiques fiables sur cette question. Elle ne veut pas dire la vérité, parce que c’est un échec cuisant des politiques publiques, par rapport à des promesses qui ont été faites et qui n’ont jamais été réalisées", argue le leader du mouvement «Ensemble». Il conclut  : "Des centaines de jeunes, voire des milliers, prennent la mer ou prennent le désert au péril de leur vie. C’est l’échec des politiques d’emplois qui ont été promises aux jeunes."