NETTALI.COM - La mise en oeuvre effective de la rémunération pour copie privée (RCP) au Sénégal se fait toujours attendre, alors que ce mécanisme est déjà opérationnel dans plusieurs pays africains, dont le Maroc, l’Algérie, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, l’Afrique du Sud et le Ghana.
Considérée comme un levier essentiel de souveraineté culturelle, la RCP permet une juste compensation des créateurs sans impact sur le budget de l’État. Fondée sur l’exception légale de copie privée, la RCP vise à indemniser les auteurs, artistes-interprètes et producteurs pour la reproduction d’oeuvres à des fins strictement personnelles, rendue possible par la généralisation des supports et appareils numériques.
Selon les estimations, les pertes cumulées pour les seuls smartphones dépassent 20 milliards de francs CFA depuis l’installation de la SODAV en 2016. Les acteurs du secteur rappellent que la rémunération pour copie privée n’est pas une taxe, mais une redevance compensatrice appliquée aux supports et appareils permettant la copie ou le stockage d’oeuvres, notamment les smartphones, ordinateurs, clés USB, disques durs, tablettes et téléviseurs. Le taux provisoire arrêté par la Commission Copie Privée est de 3 % de la valeur CAF, conformément au minimum recommandé par la directive de l’UEMOA.
Le dispositif est, selon les parties prenantes, entièrement encadré et prêt à fonctionner. Présidée par le ministère de la Culture, la Commission Copie Privée regroupe les représentants des consommateurs, des ayants droit, des douanes, des ministères concernés, des commerçants et de la SODAV. Les modalités de perception à la douane ainsi que la clé de répartition ont été définies : un tiers pour les auteurs, un tiers pour les artistes-interprètes et un tiers pour les producteurs, après une déduction culturelle de 15 % prévue par la loi.
Il ne resterait désormais qu’une étape institutionnelle : la signature du rapport de présentation du décret par les ministres en charge des Finances et de la Culture, suivie de celle du président de la République. Le décret a déjà bouclé le circuit administratif et fait l’objet d’un arbitrage final au Secrétariat général du gouvernement depuis avril 2025.
Par ailleurs, la directive n°07/ 2023/CM/UEMOA du 22 septembre 2023 rend obligatoire l’application effective de la rémunération pour copie privée dans l’ensemble des États membres. Elle fixe un cadre harmonisé, avec des taux compris entre 3 % et 10 %, appelés à évoluer vers une fourchette de 5 % à 10 % après évaluation, et impose une gestion collective transparente par un organisme agréé.
Dans un contexte de précarité persistante des artistes, accentuée par la reproduction numérique non rémunérée et la baisse progressive des subventions publiques, les acteurs culturels estiment que le Sénégal ne peut plus différer l’application de ce mécanisme prévu par la loi et exigé par les engagements communautaires.






