CONTRIBUTION - L’ UMS doit parler haut et fort. Parce qu’en démocratie, le silence face à la menace équivaut à une abdication. Les menaces proférées contre la justice peuvent être qualifiées d’atteinte au principe de séparation des pouvoirs. L’article 88 de la Constitution du Sénégal (comme beaucoup de Constitutions inspirées du modèle français) garantit l’indépendance du pouvoir judiciaire.

Ainsi, toute tentative d’intimidation de magistrats par une autre autorité de l’État constitue une violation de la Constitution. Une vraie atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire principe à valeur constitutionnelle.

La démocratie n’est jamais acquise. Elle repose sur un équilibre fragile, construit autour d’un principe cardinal : la séparation des pouvoirs 1- L’Exécutif gouverne, 2-Le Législatif fait la loi et contrôle l’action du gouvernement, 3- Le Judiciaire rend la justice au nom du peuple.

Chacun agit dans son domaine, sans empiéter sur l’autre, afin de garantir la liberté de tous.

Or, cet équilibre est aujourd’hui menacé. Lorsque le Président de l’Assemblée nationale, deuxième autorité de l’État, tient publiquement des propos qui s’apparentent à des menaces envers les magistrats, ce n’est pas une simple maladresse de langage. C’est une remise en cause de l’indépendance de la justice, une forme de pression politique donc un danger direct pour l’État de droit.

La justice : une institution sacrée

La justice n’est pas au service d’un parti, d’un camp ou d’un homme. Elle n’est pas une arme entre les mains des puissants, mais un bouclier pour les citoyens. Elle est la gardienne de l’égalité devant la loi, le dernier refuge des libertés. L’intimider, c’est porter atteinte à la confiance du peuple. La fragiliser, c’est ouvrir la voie à l’arbitraire et au règne de la force sur le droit.

L’histoire nous enseigne que les démocraties basculent toujours lorsque la justice cesse d’être indépendante.

Un Parlement fort oui, un Parlement menaçant non

Un Parlement fort est une richesse pour la République. Il doit être libre, exigeant, capable de contrôler l’Exécutif et de représenter la voix du peuple. Mais lorsqu’il se dresse en adversaire de la justice, il dénature sa mission et met en péril l’équilibre institutionnel.

Dans une démocratie véritable, les institutions ne s’affrontent pas : elles se complètent et se respectent. Un pouvoir qui méprise l’autre n’affaiblit pas seulement l’institution visée : il affaiblit toute la République.

Ces propos, d’une extrême gravité, appellent une réponse claire et responsable. Il revient aux magistrats, aux juristes, aux avocats, mais aussi à la société civile et à chaque citoyen attaché à la République, de dire fermement : non. Car la démocratie ne se défend pas seule. Elle vit de la vigilance des peuples, de la force des contre-pouvoirs et du courage de ceux qui refusent le silence face à la dérive.

L’État de droit n’est pas négociable Au Sénégal, l’État de droit est la pierre angulaire de notre vivre-ensemble. Le compromettre, c’est fragiliser nos institutions, nos libertés et notre avenir commun.

Il ne s’agit pas d’un simple débat politique, mais d’un principe fondamental : Sans justice indépendante, il n’y a pas de liberté. Sans équilibre des pouvoirs, il n’y a pas de démocratie.

C’est pourquoi, face à toute tentative d’intimidation, la réponse doit être claire, ferme et unanime. Car en République, la justice se respecte, l’État de droit se protège, et la démocratie se défend.

ME EL AMATH THIAM JURISTE-CONSULTANT, PRÉSIDENT DE JUSTICE SANS FRONTIERE