NETTALI.COM - Le tribunal correctionnel de Dakar a jugé, le mardi 23 juillet, une affaire de vol présumé avec usage de fausses clés, impliquant Khoudia Sène et Nafi Diagne. Les deux prévenues sont poursuivies pour des faits remontant à avril 2024, au préjudice de Khady Diouf, une commerçante domiciliée à l’Unité 24 des Parcelles-Assainies. Après neuf mois de détention provisoire, elles ont comparu pour répondre d’un vol portant sur un montant de 5 400 000 F CFA. Le parquet a requis deux ans de prison ferme contre chacune.
Selon l’acte d’accusation, Khady Diouf a déposé plainte auprès de la Division des investigations criminelles (Dic) le 18 avril 2024. Elle y déclare avoir perdu plus de cinq millions de francs CFA qu’elle gardait dans son appartement. La veille, explique-t-elle, son amie Khoudia Sène lui avait rendu visite. Elle affirme lui avoir montré l'argent qu'elle destinait à l’achat de marchandises en Mauritanie, dans le cadre de l’ouverture de sa boutique.
À son retour dans l’appartement, après une sortie nocturne, elle découvre que la somme a disparu. La porte n’aurait pas été forcée, ce qui laisse supposer, selon les enquêteurs, l’usage de fausses clés. L’enquête, confiée à la Dic, s’oriente rapidement vers Khoudia Sène. Les réquisitions téléphoniques révèlent que son portable a été localisé dans l’appartement de la plaignante, entre 2 h et 2 h 28 mn, dans la nuit du 19 au 20 avril. Elle aurait également passé un appel à Nafi Diagne, ce que cette dernière confirme. Un avis de recherche est lancé et les deux jeunes femmes sont finalement interpellées à la frontière sénégalo-malienne.
À la barre, Khady Diouf réaffirme ses accusations. Elle assure que seule Khoudia Sène connaissait l’endroit où était dissimulé l’argent. “Je lui ai montré la somme. C’était de l’argent que j’avais réussi à amasser pour mon voyage. Je lui ai dit que je comptais aller en Mauritanie chercher de la marchandise pour ma boutique”, dit-elle. Elle ajoute qu’après avoir bu une boisson offerte par son amie, elle se serait endormie profondément. “Quand je me suis réveillée, je lui ai même dit que je n’avais pas aussi bien dormi depuis longtemps”, raconte la plaignante. Ce n’est qu’à son retour à son domicile qu’elle a constaté l’absence des fonds. “Je l’ai appelée pour lui dire qu’on m’avait volé mon argent. Elle était la seule à savoir où je l’avais caché”, a-t-elle confié. La partie civile affirme ne connaître que Khoudia Sène. “Je n’ai jamais vu Nafi Diagne”, avoue-t-elle. Elle conteste également avoir consommé de l’alcool, contrairement à ce qu’ont laissé entendre certaines déclarations. “Je ne bois pas. Je réclame uniquement mes 5 400 000 F CFA”, conclut-elle. Khoudia Sène, commerçante, nie toute implication dans le vol.
À la barre, elle reconnaît s’être rendue chez son amie Khady Diouf, mais soutient être répartie avant que l’argent ne disparaisse. “Je n’ai pas touché à son argent. Ce jour-là, son copain était dans l’appartement”, s’est-elle défendue. Elle insiste sur le fait que la boisson consommée n’était pas de l’alcool. “Ce n’était pas de la boisson, c’était une canette de vody. C’est moi et Khady qui en avons bu. Nafi n’était même pas présente”, déclare Khoudia Sène.
Quant à Nafi Diagne, elle nie toute implication et toute connaissance des lieux. “Je ne connais même pas l’appartement de la partie civile. Je ne connais que Khoudia Sène. Je n’ai rien à voir dans cette affaire”, lance-t-elle. Elle reconnaît avoir été appelée par Khoudia, mais assure ne pas savoir dans quel contexte cet appel a été passé.
Le ministère public quant à lui, soutient la thèse d’un vol prémédité, facilité par l’usage de fausses clés. “Les faits sont clairs. Le téléphone de Khoudia a été localisé dans l’appartement de la victime à l’heure où le vol a été commis. Elle a même appelé Nafi Diagne pendant qu’elle s’y trouvait”, souligne le représentant du ministère public. Le parquet estime que Khoudia a profité du sommeil de son amie pour dérober l’argent et que Nafi faisait le guet. “L’appel passé à Nafi montre qu’elles étaient en coordination”, relève le maitre des poursuites. Il balaie la thèse d’une tierce personne, notamment celle d’un prétendu petit ami présent sur les lieux. “Elle n’a jamais parlé de cet homme lors de l’enquête. C’est une manoeuvre pour détourner l’attention”, estime le substitut du procureur de la République. Il requiert deux ans de prison ferme contre chacune des prévenues, assortis d’une amende de 50 000 F CFA, tout en sollicitant leur dispense de l’interdiction de séjour.
Maitre Alioune Badara Fall, avocat de Nafi Diagne, plaide la relaxe pure et simple. “Aucun élément matériel ne peut être retenu contre ma cliente. Elle n’était pas sur les lieux. Le seul fait retenu contre elle, c’est qu’elle a été appelée par Khoudia. Cela suffit-il à constituer une complicité ? Quelle aide ou quelle assistance a-t-elle fournie ? Rien n’a été caractérisé”, a plaidé la robe noire.
Maitre Daff, conseil de Khoudia Sène, s’appuie, quant à lui, sur les limites des données téléphoniques. “On ne peut pas localiser un téléphone avec une précision absolue. La partie civile se trouvait à l’Unité 24 et l’amie de Khoudia dans un autre quartier. Il y a une marge d’erreur”, précise Me Daff.
Le tribunal a mis l’affaire en délibéré au 24 septembre prochain. En attendant, les deux prévenues restent en détention.