NETTALI.COM - C’est une victoire historique pour la santé publique au Sénégal. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a officiellement validé l’élimination du trachome en tant que problème de santé publique dans le pays. Une annonce saluée par la communauté internationale et les acteurs nationaux, témoignant de décennies d’engagement multisectoriel.

« Je félicite le Sénégal d’avoir libéré sa population de cette maladie », a déclaré Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS. « Cette étape importante montre les avancées notables dans la lutte contre les maladies tropicales négligées, et donne espoir aux pays toujours affectés. »

Avec cette reconnaissance, le Sénégal devient le 25e pays dans le monde, et le 9e en Afrique, à franchir ce cap sanitaire majeur.

Le trachome est une infection oculaire chronique causée par la bactérie Chlamydia trachomatis. Non traitée, elle peut évoluer vers le trichiasis – une complication entraînant une cécité irréversible. Transmise par contact direct ou indirect (mouches, objets contaminés, sécrétions), la maladie prospère dans des conditions précaires d’hygiène et de faible accès à l’eau potable.

Présent au Sénégal depuis le début du XXe siècle, le trachome figurait parmi les premières causes de cécité dans certaines régions rurales. En 1998, le Sénégal rejoint l’Alliance mondiale pour l’élimination du trachome de l’OMS. La première enquête nationale a été conduite en 2000, et la cartographie complète du territoire achevée en 2022, avec l’appui du Global Trachoma Mapping Project.

L’élimination du trachome s’est appuyée sur la stratégie CHANCE, recommandée par l’OMS. Elle repose sur quatre piliers :

  • Chirurgie pour corriger le trichiasis ;

  • Antibiotiques pour traiter l’infection ;

  • Nettoyage du visage pour réduire la transmission ;

  • Amélioration de l’environnement, en particulier l’accès à l’eau potable et à l’assainissement.

Le gouvernement sénégalais, à travers les programmes nationaux de santé oculaire, a intégré cette stratégie dans ses politiques publiques. Au total, 2,8 millions de personnes dans 24 districts ont bénéficié d’interventions chirurgicales, de traitements de masse à base d’azithromycine (fournie par Pfizer via l’Initiative internationale contre le trachome), ainsi que de vastes campagnes de sensibilisation.

Des indicateurs clés validés par l’OMS

L’élimination du trachome comme problème de santé publique repose sur des critères stricts :

  • Une prévalence du trichiasis inférieure à 0,2 % chez les personnes de plus de 15 ans ;

  • Une prévalence de l’inflammation trachomateuse folliculaire (TF) inférieure à 5 % chez les enfants de 1 à 9 ans, pendant au moins deux ans, sans nouveau traitement de masse ;

  • Un système de surveillance durable et efficace.

Tous ces critères ont été remplis, validant ainsi l’élimination.

Ce succès est le fruit d’une synergie entre acteurs de la santé, de l’hydraulique, de l’assainissement, de l’éducation et de la société civile. Le ministère de la Santé et de l’Action sociale a salué le travail des agents sur le terrain ainsi que le soutien de nombreux partenaires techniques et financiers, parmi lesquels Sightsavers, Speak Up Africa, FHI 360, RTI, l’USAID et l’OMS.

« Cette avancée sanitaire démontre que l’élimination des maladies tropicales négligées est possible avec une volonté politique forte, l’implication des communautés et un appui technique structuré », souligne un communiqué du ministère.

Après avoir éliminé la dracunculose (ver de Guinée) en 2004, cette victoire sur le trachome constitue un pas de plus vers l’objectif d’un Sénégal libéré des maladies tropicales négligées. Des progrès notables sont également enregistrés dans la lutte contre la trypanosomiase humaine africaine (maladie du sommeil) et l’onchocercose (cécité des rivières).

Les autorités sanitaires insistent sur la nécessité de pérenniser les résultats en poursuivant les efforts dans les domaines clés : réduction de la pauvreté, amélioration de l’accès à l’eau, promotion de l’hygiène et surveillance épidémiologique renforcée.

La reconnaissance officielle par l’OMS de l’élimination du trachome au Sénégal est une victoire collective et un signal fort pour la santé publique en Afrique. Elle prouve qu’avec de la détermination, des ressources et une vision claire, il est possible de venir à bout de fléaux longtemps considérés comme inévitables.