NETTALI.COM - Réunis au siège de l’Ordre des Architectes du Sénégal, les acteurs du bâtiment appellent à une mobilisation générale pour mettre fin aux catastrophes des bâtiments menacés de ruine dans le secteur de la construction. Ils ont profité de l'occasion pour faire un plaidoyer sur le respect des normes de constructions et sur la responsabilité des différents acteurs et tout en annonçant des actions.
Des professionnels du secteur du bâtiment se sont rassemblés au siège de l’Ordre des Architectes pour un constat amer, mais lucide, celui de l’effondrement des bâtiments. Un phénomène devenu une tragédie récurrente. Unis autour d’une même ambition, ces professionnels ont appelé à un sursaut collectif face à cette situation aux causes multiples. « Un immeuble qui s’effondre est un échec collectif. Et l’art de bâtir est à repenser quand le bâtiment tue », a déclaré Papa Dame Thiaw, vice-président de l’ODAS, dans un discours.
Selon l’Inspection Générale des Bâtiments, plus de 1400 édifices sont aujourd’hui menacés de ruine à Dakar et dans les grandes villes du pays, renseigne Papa Dame Thiaw. À l’origine de ces drames : absence d’études de sol, matériaux non conformes, défauts de conception, main-d’œuvre non qualifiée, contrôles inexistants ou inefficaces. Un cocktail de négligence et d’irresponsabilité partagé à tous les niveaux de la chaîne de construction, fait observer le vice-président de l'ODAS..
Une responsabilité partagée, un appel à la rigueur
Pour le vice-président de l’Ordre, aucun maillon de la chaîne ne peut se dérober à sa part de responsabilité. De la conception à la dernière pierre, en passant par le contrôle et l’exécution, chaque acteur a un rôle déterminant à jouer pour garantir des bâtiments sûrs.« Notre responsabilité collective dans la sécurité d’un bâtiment ne peut être imputée à un seul acteur, mais à l’ensemble de la chaîne », a-t-il martelé.
Les architectes qui interviennent dès la phase de conception, ont le devoir d’exiger l’application stricte de la loi et de s’assurer de l’implication des autres corps de métier, note-t-il. Les géotechniciens, garants de la stabilité des fondations, doivent être systématiquement sollicités. Les ingénieurs doivent fournir des études techniques fiables. Les bureaux de contrôle, véritables garants de la conformité, doivent valider chaque étape. Les entrepreneurs, eux, doivent exécuter les travaux avec rigueur, en s’appuyant sur des ouvriers formés et des matériaux certifiés. Une chaîne de responsabilités que le vice président a tenu à situer.
Des propositions concrètes pour une rupture
Les professionnels appellent également l’État à jouer pleinement son rôle. Des politiques publiques existent, rappelle Papa Dame Thiaw, mais leur application reste faible. Les collectivités locales, en charge des autorisations de construire doivent s’entourer de professionnels compétents pour évaluer les projets en amont et assurer un suivi effectif. Autre pilier essentiel du dispositif : le citoyen, présenté comme un acteur de veille. Il est invité à signaler toute anomalie visible et à exiger la transparence sur les chantiers.« Le bâtiment est le lieu d’expression de la vie sous toutes ses formes. Nous devons bâtir des immeubles durables, mais aussi une culture de la responsabilité », a soutenu M. Thiaw
Pour sortir de cette spirale d’improvisation et de désastre, les participants ont esquissé plusieurs pistes d’action immédiates : une campagne nationale de sensibilisation dans les médias et sur les chantiers, la mise en place d’une formation continue pour les ouvriers et techniciens du bâtiment, la création d’une plateforme citoyenne de signalement des bâtiments à risque, l’instauration d’un label qualité pour les entreprises respectueuses des normes, le renforcement des inspections menées par les autorités locales et nationales.
En attendant la mise en place d’une inter-ordre professionnelle solide, Papa Dame Thiaw plaide pour que l’éthique professionnelle reste le socle de toute action. C’est cette rigueur morale, estime-t-il, qui garantira à chaque acteur sa juste place et sa responsabilité dans l’édifice national.
« Quand le bâtiment tient dans sa fonction, il est juste d’affirmer que la chaîne de responsabilités a été assumée. Dans l’éthique, construisons mieux. Ensemble, préservons la vie», a-t-il tenu à préciser