NETTALI.COM - Première femme procureure au Sénégal et figure respectée du barreau, Dior Fall Sow est revenue ce dimanche sur l’évolution de la justice sous les différents régimes du pays. Invitée de l’émission Objection sur Sud FM, elle a dressé un bilan sévère de la période libérale, tout en saluant le sursaut actuel observé dans les rangs de la magistrature.

C’est une voix autorisée et sans concession qui s’est exprimée ce dimanche au micro de Sud FM. Dior Fall Sow, magistrate chevronnée et fondatrice de l’Association des juristes sénégalaises (AJS), a livré une analyse sans fard de la trajectoire de la justice sénégalaise, des indépendances à nos jours.

À l’en croire, les premières décennies post-indépendance ont été marquées par un équilibre salutaire entre l’Exécutif et le pouvoir judiciaire. « Sous Senghor et Mamadou Dia, puis au début du règne d’Abdou Diouf, la justice était respectée et se faisait respecter. Il y avait une vraie indépendance et une collaboration fondée sur le respect mutuel », a-t-elle rappelé, citant les figures emblématiques d’Isaac Forster, Kéba Mbaye et Ousmane Camara.

Mais pour la magistrate, la dégradation s’est accélérée à partir de 2000, avec l’arrivée d’Abdoulaye Wade au pouvoir, et s’est poursuivie sous Macky Sall. « Les deux dernières présidences ont sérieusement abîmé l’image de la justice. J’ai été profondément peinée de voir cette institution perdre son estime auprès des citoyens et de la scène internationale », a-t-elle regretté.

Cette détérioration, selon Dior Fall Sow, a instauré une crise de confiance entre Thémis et les justiciables, nourrie par des interférences de l’Exécutif et une instrumentalisation de la justice dans les affaires politiques.

Malgré ce sombre constat, la magistrate se veut optimiste. « Il y a aujourd’hui un travail sérieux qui se fait pour redorer le blason de la justice sénégalaise. Les magistrats s’efforcent de reprendre en main leur rôle et de restaurer l’autorité de leur institution », a-t-elle salué, non sans inviter à maintenir cette dynamique de réforme et d’assainissement.

Un témoignage rare et précieux, à l’heure où la justice sénégalaise est plus que jamais au cœur des débats nationaux.