NETTALI.COM - Convoqués en session extraordinaire, le lundi 17 juillet, alors que les députés étaient déjà en vacances, comme cela se passe chaque année à la fin du mois de juin, ils devaient examiner des projets de lois issus des conclusions du dialogue national, d'il y a quelques semaines. Mais déjà, des voix se sont élevés pour désapprouver la révision de l’article 87 de la Constitution, entre autres textes à examiner. Une levée de boucliers qui fait suite à la publication du projet de loi portant révision de la Constitution et qui a incité le président de la République à retirer le texte polémique.

Beaucoup de voix s'étaient élevées, notamment celles d'Aminata Touré, l'ancien parlementaire Doudou Wade, le député Thierno Alassane Sall, et bien d'autres. Un article 87 qui était parti pour ne pas être voté.

Abba Mbaye, Taxawu Sénégal : "Quoi qu’il nous en coûte, on votera contre ce texte."

Bien qu’ayant répondu positivement à l’appel au dialogue du président de la République en juin dernier, les députés de "Taxawu Sénégal" ont catégoriquement refusé cette modification de l’article 87 de la loi fondamentale. Un refus qui a été bien résumé par Abba Mbaye : "On a vu un exposé des motifs qui nous dit qu’il faut rationaliser le calendrier électoral. Comment peut-on nous dire, dans un pays qui vote un budget de 7 000 milliards F CFA, qu’on n’a pas de quoi faire des élections ? Si on veut que les populations s’expriment pour désamorcer la radicalité, il faut multiplier les élections. Quoi qu’il nous en coûte, on votera contre ce texte, en toute responsabilité et en toute maturité."

Le député socialiste a d'ailleurs estimé que dans le texte qui a été présenté, les points 29 (disposition sur le parrainage) et 87 ont été donnés sous format d’article unique. "Donc, s’il faut renoncer au parrainage, nous sommes prêts à le faire. Mais ce serait une cassure dans les concertations que nous avons eues avec les acteurs politiques. Pour nous, le rejet de l’article 87 emporte le rejet de l’article 29. C’est une conséquence juridique” tel que le projet est libellé.

Thierno Alassane Sall : "On demande à l’Assemblée de se suicider et se délester du semblant de pouvoir qu’il lui reste."

Pour justifier ce rejet, le député Thierno Alassane Sall invoque un grand recul pour la démocratie. En effet, argumente-t-il, "le président de la République pourra dissoudre l'Assemblée nationale sans même qu’il y ait au préalable une motion de censure. Au parlement qui n’avait aucun pouvoir, on lui demande de se suicider et se délester du semblant de pouvoir qu’il lui reste. Vous voyez qu’il y a même des députés de la majorité qui sont contre ce projet de loi".

Loin de cette position affichée des deux députés de l’opposition, Nafissatou Diallo du PDS appelle à attendre le travail de la conférence des présidents et les discussions en commission technique. "Nous sommes un parti responsable. Nous n’allons pas animer un débat sur la base de rien du tout et crier avec les loups. Attendons de voir les lois qui ont été proposées, sur quelle base la saisine a été faite ? Sinon, on parle dans le vide et on tombe dans la manipulation”, a assuré la coordinatrice nationale à la communication du Parti démocratique sénégalais.

Dans la soirée, un communiqué du pôle de l’opposition au dernier Dialogue politique se démarque de la modification de l’article 87 de la Constitution, faisait savoir que ce n’est pas le fruit "d’un consensus du Dialogue national’ ni d’un “accord” issu de ces discussions. C’est ainsi que dans la même note, le pôle exige “son retrait pur et simple afin d’éviter de jeter le discrédit sur les importants points de consensus obtenus lors de nos discussions, tant dans la commission du Dialogue politique que dans le comité de suivi".

La modification finalement retirée

Face à la virulence des critiques sur la modification de l’article 87 de la Constitution, le passage polémique va finalement être retiré du projet de loi par une modification du texte. Mais selon les députés de la majorité, il s’agit d’une demande qu’ils ont eux-mêmes faite au chef de l’État. Le docteur Malick Diop explique : "Nous avons notre propre appréciation par rapport aux projets de loi qui arrivent. Et nous ne voyons pas l’opportunité de déposer l’article 87. Donc, c’est nous, le groupe Benno Bokk Yaakaar, qui avons demandé le retrait de ce texte. Suite à la demande de son groupe, le président de la République a invité le ministre de la Justice à reformuler le projet de loi en supprimant cette modification de l’article 87."

Rappelons qu'en ce qui concerne cet article 87, dans l’exposé des motifs, l’exécutif a informé : "Pour répondre aux nécessités de rationalisation du calendrier électoral et d’une meilleure harmonisation des rapports entre le pouvoir Exécutif et le pouvoir Législatif, il est procédé à la suppression de la période pendant laquelle il ne peut être procédé à la dissolution de l’Assemblée nationale"

Le nouvel article 87 était ainsi libellé comme suit : "le président de la République peut, après avoir recueilli l’avis du Premier ministre et du président de l’Assemblée nationale, prononcer, par décret, la dissolution de l’Assemblée nationale.

L’alinéa 2 précise : "le décret de dissolution fixe la date du scrutin pour l’élection des députés. Le scrutin a lieu soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus après la date de publication dudit décret."