NETTALI.COM- Prenant la parole, ce mardi 25 octobre 202, lors de la seconde journée du forum sur la paix et la sécurité en Afrique, le ministre malien des Affaires étrangères n’a pas fait dans la langue de bois envers les partenaires des pays africains. Abdoulaye Diop a appelé à un sursaut en relevant que « certains de nos partenaires, ont plus besoin de l’Afrique que l’Afrique n’a besoin d’eux ». Il n’a pas aussi manqué de critiquer les Africains ainsi que les organisations africaines.

C’est à un véritable sursaut que le ministre des Affaires étrangères malien a appelé les pays africains. En fait, Abdoulaye Diop qui prend part au forum sur la paix et la sécurité en Afrique ouvert ce lundi 24 octobre 2022 à Dakar, a fait le procès de la relation de partenariat entre l’Afrique et les autres pays. « Il est vrai que l’Afrique a besoin de ses partenaires pour se développer, pour assurer sa sécurité, mais certains de nos partenaires ont plus besoin de l’Afrique que l’Afrique n’a besoin d’eux », a-t-il déclaré.

selon lui, « il faut que nous (les africains) ayons confiance en nous-mêmes, que nous ayons conscience de ce que nous représentons et que nous ayons conscience de notre responsabilité par rapport aux défaillances de l’Afrique pour pouvoir aussi apporter des réponses appropriées à ces questions. » Pour cela, soutient le ministre malien, « l’Afrique ne souhaite pas être un terrain de compétition pour quelque partenaire que ce soit. Je crois que chaque partenaire cherche son intérêt. L’Afrique n’est pas naïve et c’est normal aussi que les partenaires cherchent leurs intérêts. »

Face à cette situation, M. Diop considère « qu’il appartient aux africains de pouvoir se positionner pour développer leurs pays et tirer profit de ces partenariats. » Il poursuit : « ce que nous souhaitons, c’est de ne pas être un terrain de jeu pour les uns et les autres. Beaucoup aiment la richesse de l’Afrique, mais ne donnent pas la même considération aux africains. Ceux qui viennent, se bagarrent pour les richesses africaines et quand les jeunes gens de ces pays se dirigent vers leur pays, ils sont rejetés. »

Pour Abdoulaye Diop, il faut changer de paradigme. « Quand les partenaires agissent ainsi avec nous, il faut que les intérêts vitaux des populations africaines soient au centre du débat avec nos partenaires. Les ressources qu’on présente comme étant les causes des instabilités sont en réalité nos principales richesses. Il faut changer le narratif », dit-il. Et à son avis, si l’Afrique n’y arrive pas, « c’est parce que nous avons un héritage colonial et néocolonial qui a du mal à partir. Et, nous avons souvent des partenaires qui sont dans une posture coloniale qui n’ont pas compris qu’il faut changer de logiciel pour travailler avec les africains. Il faut venir en partenaire. »

L’Afrique demande la respectabilité, le respect

Poursuivant son procès contre les partenaires africains, le chef de la diplomatie malienne martèle qu’ « avant la souveraineté, l’Afrique demande la respectabilité, le respect. Il faut travailler avec les Africains dans la dignité. Il faut que les partenaires considèrent qu’ils ne viennent pas en chasse sur des terres incognito. Mais, nous venons travailler avec des gens où chacun doit gagner. »

Dans son procès, Abdoulaye Diop a aussi pointé du doigt le choix des partenaires. « Il faut que les partenaires comprennent que le choix des partenaires est la responsabilité des africains. Et que nous avons l’intelligence de comprendre ce que chaque partenaire apporte sur la table. Certains partenaires qui sont dans des postures néocoloniales quand ils viennent à nous pour nous dire ce qui est bien et pas bien pour nous. Je pense que ça, c’est infantiliser le continent, penser que nous ne sommes même pas capables de comprendre là où se trouve notre intérêt. Parce que le partenaire qui vient parler mal des autres lui-même n’est pas parfait », assène-t-il.

"Le terrorisme souvent fabriqué"

Revenant sur le thème, le ministre malien s’est montré sceptique quant à l’ampleur du terrorisme en Afrique. « Le terrorisme dans beaucoup de nos pays, une partie est fabriquée. Je pense que ce n’est pas nouveau. Dans certains cas, l’extrémisme religieux peut conduire à ça. Mais je suis convaincu qu’il y’a des phénomènes qui sont créés pour mettre l’Afrique en retard. Pour ne pas nous permettre d’exploiter nos ressources. De ne pas nous permettre d’avoir la paix et la stabilité qui nous permettent de nous unir en tant qu’africains. Beaucoup de partenaires sont dans des approches de prédation. Ils ont besoin d’instabilité pour pouvoir contrôler des élites et de faire avancer leur agenda », accuse M. Diop.

Les organisations africaines aussi en ont pris pour leur grade. Plaidant pour un leadership vraiment africain pour l’affirmation de notre souveraineté, M. Diop affirme qu’ « aujourd’hui, beaucoup de nos organisations sont instrumentalisées. » A ce propos, il souligne que les partenaires qui expriment leur soutien à la Cedeao ou à l’Union africaine, souvent, « c’est pour mieux les détruire. » Parce qu’argue-t-il, « certains savent que ces organisations nous permettent d’être uni pour pouvoir être une force. Nous sommes en faveur de ces organisations, mais il faut que ces organisations affirment un leadership vraiment africain et que nous, nous puissions apporter des réponses africaines. Il faut éviter les ingérences dans les politiques africaines pour pouvoir laisser les africains évoluer en citoyens matures qui sont capables de trouver des solutions. »

Au-delà des organisations africaines, le ministre des Affaires étrangères, n’a pas épargné les africains. « Nous aussi africains, nous avons un problème. Je ne peux pas comprendre qu’un continent de la taille de l’Afrique ne puisse pas assurer sa sécurité. Souvent nos pays se battent seuls face à des situations critiques. Ce sont les non africains qui viennent nous aider pendant que d’autres pays n’assument pas leur responsabilité vis-à-vis du reste de l’Afrique », déplore-t-il.

Face à ce constat, il estime que « si l’Afrique met ensemble ses forces, nous sommes capables d’assurer la  sécurité, d’amener la stabilité et faire avancer la démocratie. » « On doit mettre nos petits moyens ensemble pour faire face à ces menaces », plaide Abdoulaye Diop.