NETTALI.COM - Réagissant à l’annonce du décès de l’ancien président tchadien Hissène Habré, le militant des droits de l’Homme, Alioune Tine, a fait part de sa tristesse et déploré que "l’alerte’’ de son épouse et de certaines organisations relativement au danger lié à son incarcération en temps de Covid-19 n’ait pas été entendue.

"Je suis triste de cette nouvelle et triste que l’alerte de sa femme et la réaction de quelques organisations de droits humains n’aient pas été entendues par la justice", a déploré Alioune Tine.

Le 23 août, Fatime Raymonde Habré, son épouse, avait confirmé par communiqué que l’ancien président avait été contaminé par le Covid-19, ajoutant que des moyens avaient été mobilisés pour diligenter ses soins, dans un hôpital public sénégalais disposant d’un "plateau technique de qualité à même de traiter un cas aussi sérieux".

En exil depuis sa chute fin 1990, Hissène Habré avait été jugé pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité et condamné à la prison à la perpétuité par les Chambres extraordinaires africaines (CAE), en 2016 – sentence confirmée en appel l’année suivante.

Il était surveillé 24 heures sur 24 par deux gardes de Cap Manuel, prison dakaroise où il était incarcéré et avait commencé à purger sa peine.

En avril 2020, il avait bénéficié d’une autorisation de sortie provisoire de deux mois dans le contexte de la pandémie de coronavirus. Il avait alors rejoint son domicile dakarois, en résidence surveillée.

Une nouvelle demande avait été déposée par son entourage en avril dernier, mais cette demande de liberté provisoire avait été rejetée, les services compétents jugeant que les risques médicaux encourus ne le justifiaient pas.

Début juillet, sa famille avait demandé à la justice sénégalaise de lui accorder une permission à cause de la résurgence du COVID-19 dans le pays.

Alioune Tine, qui s’était battu en son temps pour que Habré soit jugé, avait lui souhaité qu’il puisse bénéficier d’une permission.

"Ce que je regarde, c’est le détenu et ses droits, pas le dictateur. C’est une personne vulnérable, il n’a pas encore été vacciné. Il a fait huit ans en prison, il est compréhensible qu’en période de Ramadan, on puisse lui permettre de rentrer chez lui. C’est presque une raison humanitaire !", déclarait-il.

Alioune Tine, au-delà du cas Habré, demande à l’Etat d’ouvrir une enquête sur les circonstances dans lesquelles les détenus vivent avec la COVID-19.

"L’Etat sénégalais doit ouvrir une enquête sur les circonstances de l’existence de la COVID-19 en prison", a-t-il dit.

Pour le président fondateur du think tank AfrikaJom Center, "il faut désormais envisager de vacciner les détenus qui ont droit à la santé et à la vie et ceux qui ont l’âge et les vulnérabilités de Habré".

"Il faut envisager des mesures spécifiques pour leur protection. La justice elle doit être égale pour tous", a fait valoir l’ancien responsable de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (RADDHO).

Il a insisté sur la nécessité de protéger les droits des détenus reconnus dans la Constitution.