NETTALI.COM - Entre abstention, sobriété et accusations de sabotage, la visite du président de la République en Casamance continue d’alimenter la polémique. Décryptage !

Le fait est rare pour être souligné. Pour une rare fois, Bassirou Diomaye Diakhar Faye se déplace en terre casamançaise, dans une visite très médiatisée, sans son “mentor” politique, devenu son Premier ministre, Ousmane Sonko.

Intervenue en plein contentieux politique, cette visite ne laisse pas indifférent. Elle suscite pas mal de commentaires et de controverse au niveau de la base : des militants et sympathisants du parti Pastef (Les patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité).

Chez les responsables du parti présidentiel en Casamance, le mot d’ordre c’est “abstinence” ; “restez chez vous”…. Comme s’ils s’étaient passé le mot. “J’ai pris la décision de m’abstenir de tout commentaire concernant la tournée du Président de la République en Casamance….”, a décliné gentiment ce responsable, estimant s’occuper de ses propres affaires économiques. “Abstinence”.

Ce mot est revenu plusieurs fois dans les échanges avec les militants et observateurs. Journaliste au Groupe Médias du Sud, Ansoumana Dasylva confirme la ligne officielle du Pastef : “C’est vraiment l’abstinence qui est prônée. Même quand tu les (les responsables) interpelles, ils disent : ‘dagn ciy mandou’ (ça ne nous regarde pas en wolof). Il n’y a aucune communication officielle des instances.”

Une visite qui renforce les divisions

Dans les réseaux sociaux, cependant, aucune maîtrise. Chacun y va de son commentaire, de ses sentiments. Entre ceux qui se réjouissent de l’absence de ferveur populaire, ceux qui tentent de relativiser en invoquant la volonté de rupture à travers la sobriété, ceux qui dénoncent un sabotage, la guerre reste féroce.

Pourtant, le Premier ministre avait appelé à un accueil chaleureux, à la suite de l’annonce de cette tournée en Conseil des ministres, le 11 décembre dernier. Il disait : “c'est une tournée importante, avec des inaugurations, des lancements de nouveaux projets, mais aussi une occasion pour communier avec les populations. C’est pourquoi, nous demandons à toutes les populations de réserver au Président un accueil chaleureux.”

Depuis, c’est silence radio. Les instances du parti sont restées aphones. Résultat : la sortie du chef de l’État s’est faite sans grande mobilisation.

Pas de foule, mais un dialogue direct, sans protocole et en toute simplicité

Cela n’a pas empêché le président de la République de dérouler son calendrier. Inaugurant certaines réalisations, lançant des projets, communiant directement avec les populations.

Hier (dimanche 21 décembre), dans l’après-midi, le président de la République était à Coubalan, dans le département de Bignona… Selon ses services de communication, il a été accueilli “dans une forte ferveur populaire, au cours d’une cérémonie empreinte de chaleur humaine et de convivialité, illustrée par une atmosphère de cousinage entre communautés diola et sérère, symbole vivant de cohésion sociale et de paix durable”.

Depuis 1960, magnifie la cellule de communication de la Présidence, c’est la première fois que la localité de Coubalan reçoit la visite d’un Président de la République. À cette occasion, souligne la Présidence, les populations ont exprimé massivement leur satisfaction et leur gratitude.

Les communautés entre reconnaissance et doléances

La même chaleur a aussi été notée à Dar Salam (commune de Nyassia) et même au quartier HLM Nema où se trouve la maison familiale d’Ousmane Sonko. En l’absence des foules monstrueuses, le président de la République a pu dialoguer directement avec les populations, sans protocole, et en toute simplicité.

D’ailleurs, les élus des communes visitées n’ont pas manqué de saluer ce contact direct entre le chef de l’État et les communautés. “Monsieur le président de la République, nous vous remercions pour avoir été là, pour avoir choisi la commune de Nyassia, pour avoir choisi le village de Dar Salam pour abriter cette cérémonie. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants, nous demandons encore et encore de prêter davantage attention à cette commune meurtrie depuis des années”, s’est réjouie l’une des rares maires de l’opposition dans la région de Ziguinchor, Justine Manga, ancienne militante de l’UCS d’Abdoulaye Baldé, qui avait rejoint Doudou Ka et l’Alliance pour la République de Macky Sall à la veille de la présidentielle.

À Coubalan également, les populations, par la voix de leur maire Mamadou Lamine Sora, ont exprimé leur reconnaissance et formulé leurs préoccupations sociales.

Diomaye parle aux élus et aux coordinateurs communaux de Pastef

La tournée économique a aussi eu une forte connotation politique. Au-delà des visites de chantiers, le président de la République a également rencontré les élus de la Casamance. Au premier jour, il a reçu en audience presque tous les élus des régions de Ziguinchor et de Sédhiou, sans distinction : maires et président de conseil départemental.

Pour la Présidence, cette rencontre a permis des échanges approfondis avec les maires et responsables territoriaux. “Les élus ont partagé les préoccupations de leurs collectivités, les attentes des populations ainsi que les priorités en matière de développement économique, social et de désenclavement, tout en saluant cette démarche de dialogue direct”, s’est félicité les services de com de Diomaye. À

travers cette audience, note la Présidence, le chef de l’État, réaffirme l’importance qu’il accorde à l’écoute et à la concertation avec les élus locaux, acteurs essentiels du développement territorial : “Cette approche s’inscrit dans une volonté de renforcer une gouvernance de proximité, fondée sur des projets structurants, des moyens adaptés et un développement harmonisé, inclusif et durable des territoires.”

Hier, c’était au tour des élus et militants du Pastef. Le président de la République a ainsi rencontré les députés et coordinateurs communaux de son parti, dans un contexte marqué par des divergences profondes. À noter que ces rencontres se sont tenues loin des projecteurs des médias.

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