NETTALI.COM - Deux cents milliards de francs CFA. C’est le montant que le Premier ministre espère tirer du secteur de la téléphonie grâce à la réactivation de la Redevance sur l'accès ou l'utilisation du réseau des télécommunications publiques (Rutel). Le projet de loi y afférent vient d’être adopté en Conseil des ministres. Mais en quoi consiste cette taxe ? Et quel sera son impact sur les consommateurs sénégalais ?
En août 2025, Ousmane Sonko avait dévoilé son plan de redressement économique visant à mobiliser 5 667 milliards de francs CFA. Parmi les principales niches fiscales ciblées figure le secteur de la téléphonie.
Lors de la présentation de ce plan, il avait annoncé la réactivation des droits à l’importation des téléphones portables, suspendus depuis plusieurs années, en même temps que la Rutel.
“Tout le monde convient, les autorités douanières et le ministère des Finances, qu’il est temps de remettre en place cette taxation et les projections sont à 200 milliards”, avait affirmé le Premier ministre.
Ce mercredi, un premier pas a été franchi avec l’adoption en Conseil des ministres du projet de loi modifiant la loi n°2008-46 du 3 septembre 2008, qui avait institué cette redevance. Le texte devrait prochainement être transmis à l’Assemblée nationale pour examen.
Instituée en 2008 par le président Abdoulaye Wade, la Rutel visait à compenser la faiblesse des recettes douanières issues des importations de téléphones portables, évaluées alors à seulement 380 millions de francs CFA par an.
Le dispositif prévoyait une taxe de 2 % sur le chiffre d’affaires des opérateurs pour la téléphonie fixe et mobile, avant que le taux ne soit relevé à 5 % du montant hors taxes des prestations facturées aux clients.
Cette réforme s’était rapidement révélée rentable. En septembre 2011, la Direction de la Prévision et des Études Économiques (DPEE) annonçait que les recettes avaient bondi de 10 milliards en 2010 à 16,1 milliards en 2011, à la faveur de la hausse du taux.
Pour l’heure, le contenu exact du projet de loi adopté par le gouvernement Sonko n’a pas encore filtré. Une incertitude qui pousse les acteurs du secteur à la prudence.
Mouhamadou Lamine Badji, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de Sonatel (SYTS), rappelle que la Rutel est avant tout “une taxe indirecte supportée par le consommateur”.
Il avertit : “Il ne faut pas chercher à taxer au point de tuer l’activité. Trop de taxes finiraient par étouffer le secteur. Tout doit se faire dans le dialogue avec les parties prenantes.”
Même son de cloche du côté de la société civile. Momar Ndao, président de l’Association des consommateurs du Sénégal (Ascosen), souligne que la redevance existe toujours : “Quand vous achetez un abonnement, du crédit ou que vous effectuez des transactions électroniques, la taxe est déjà incluse. La Rutel n’a jamais été abrogée.”
Le gouvernement espère faire de la Rutel une importante source de recettes parafiscales. Mais son application risque d’alimenter le débat sur le pouvoir d’achat des ménages, déjà fragilisé par la cherté de la vie.
Reste désormais à savoir si les députés entérineront ce projet de loi et, surtout, dans quelle mesure son application se traduira concrètement sur les factures des consommateurs sénégalais.