CONTRIBUTION - 7 Mars 1986 au Caire,il était midi à Dakar,le Sénégal après 18 ans de traversée du désert venait de renouer avec le gotha du football africain après Asmara 1968,le seul tournoi continental auquel il avait participé jusque là avec les Yatma Diop,Yatma Diouck,Louis Camara,Demba Thioye,Amady Thiam et Mawade Wade comme entraîneur.

Après avoir laminé le Zimbabwé à Demba Diop un soir de Septembre 1985, une génération talentueuse composée de professionnels (SENEF) et de locaux chevronnés conduits par Pape Diop, parmi lesquels on peut citer Jules Bocandé,Thierno Youm, Oumar Guèye Séne, Christophe Sagna, Pape Fall, Mamadou Teuw, Amadou Diop Boy Bandit, Cheikh Seck, Moussa Diop Quénum entre autres, se retrouvait dans la grande messe du foot africain pour faire face à des Pharaons amenés par Taher Abou Zeid,Rabiya Yacine,Magdi Abdel Gani,El Batal. Le Sénégal parvint à créer la sensation en match d'ouverture en disposant des Egyptiens sur un score étriqué d'un but à zéro devant 80.000 spectateurs acquis à leur cause et le monde du football en fit un sérieux prétendant au titre.

L'euphorie gagna le pays entier qui s'était mobilisé en finançant le budget de cette campagne de Caire 86. Étant à l'école primaire, la pièce de 50 francs que m'avait donnée ma mère avait servi de contribution à l'effort de guerre. Il en était ainsi de tous les potaches de l'époque. Loin des temps actuels où le budget national prend entièrement en charge tous les frais et primes liés à la sélection à coup de milliards. Tout ne fut pas aussi rose naguère.

Hélas après une deuxième victoire sur le Mozambique, le Sénégal allait chuter face à la Côte d'Ivoire sur un but assassin d'Abdoulaye Traoré. Ainsi on assista à la grande désillusion de Caire 86 et ce fut un choc traumatique qui continue de hanter bien des passionnés du foot sénégalais.

La revanche n'aura pas lieu l'édition suivante car le Sénégal dirigé par Joe Diop et Mawade Wade (DTN), allait être éliminé par le Zaïre des Bwana, Muntubile Santos, Ellengessa, Kingambo Kossingba, Kassongo après un arbitrage chaotique du Gabonais Jean Fidel Diramba au match retour à Kinshassa.

Puis vint Algérie 90 sous la conduite de Claude Leroy, entraîneur victorieux de l'édition précédente avec le Cameroun. Un bon dosage de pros et de locaux avec les Sané, Bocandé, Adama Cissé, Ibrahima Ndiaye Chindou, Lamine Sagna. L'histoire s'arrêta en demi-finale face au pays hôte sur une tête de Amani Djamel dans un duel aérien avec Roger Mendy et l'Algérie des Cherif El Ouazzani, Djamel Menad, Rabbah Majer triompha.

Contre mauvaise fortune bon cœur, nous prîmes notre mal en patience pour attendre la CAN 92 qui allait se dérouler chez nous. Malheureusement, le Cameroun allait mettre un terme au rêve de tout un peuple sur un but d'Ernest Ebongué. Une désillusion de plus.

1994, rebelote avec une qualification obtenue sur tapis vert après une faute administrative de l'Algérie. Une équipe pleine de promesses sous la houlette du duo Bocandé-Locotte avec les Athanase Tendeng, Moussa Camara, Momath Guèye Boss, Mamadou Faye, Adolphe Mendy allait s'arrêter en 1/4 de finale face à la Zambie sur un tir lointain qui signa la fin de carrière de Cheikh Seck dont la place de titulaire à l'époque était fort discutable.

La CAN 96 en Afrique du Sud remportée par la nation arc en ciel des Mark Fish, Doctor Khumalo, Lucas Radebe, Philmon Masinga ne verra pas la participation des Lions du Sénégal tout comme celle de 1998 au Burkina Faso.

Puis vint 2000 avec le Sénégal de Peter Schnittger avec de performants joueurs en Afrique d'une Jeanne d'Arc que présidait Omar Seck ainsi que la fédération avec les Assane Ndiaye, Oumar Traoré, Salif Keita, Henry Camara, Ousmane Diop, Khalilou Fadiga, Oumar Daf. Très valeureux, ils tombèrent les armes à la main dans l'antre mythique du Surulere Stadium en 1/4 de finales.

Ensuite arriva 2002 avec beaucoup d'espoirs sous la férule de Bruno Metsu avec une génération dorée composée des Elh Diouf, Aliou Cissé, Salif Diao, Fadiga, Oumar Daf, Pape Malick Diop, Pape Birahim Sarr, Pape Bouba Diop, Henry Camara. Cette équipe fit un parcours magnifique et échoua en finale aux tirs aux buts face au Cameroun des Eto'o, Pius Ndieffi, Kala, Mboma,Foé.

En 2004,le Sénégal se perdit dans le brouillard de Radès en 1/4 de finale sous Guy Stéphan. On fit mieux en 2006 en Egypte après être éliminé en 1/2 finale suite à un premier tour dont le bilan famélique avec une victoire et deux défaites nous obligea à prendre nos calculettes. Amara et Abdoulaye Sarr étaient aux manettes.

Arriva la CAN 2008 au Ghana,où les ambitions du Sénégal allaient être ensevelies à Tamalé dès le premier tour. Henry Kasperczack quitta le navire après le deuxième match et Lamine Ndiaye prit la barre sans pouvoir éviter le naufrage.

On rata la CAN 2010,un échec cuisant qui avait vu le renvoi de Lamine Ndiaye après notre troisième place derrière l'Algérie et la Gambie qui est venue faire match nul (1-1) à Dakar. Ce match a fermé l'ère des Diouf et Fadiga en sélection, la "fin tragique d'une génération dorée" selon les mots mêmes de l'ancien bad boy au crâne peroxydé.

2012 aura été un fiasco malgré un effectif hors normes avec les Moussa Sow, Kader Mangane, Demba Ba, Mamadou Niang pour ne citer que ceux là avec Amara Traoré comme entraîneur et des éliminatoires bluffants. 3 matches,3 défaites sur un même score (2-1) à Bata. Je peine toujours à comprendre la raison de cet échec malgré l'énormité de notre potentiel de l'époque.

2013,nous sommes éliminés par là Côte d'Ivoire lors des qualifications et le Stade Senghor fut suspendu à cause des agissements de supporters dépités et s'étant sentis humiliés au plus profond de leur chair et sur leurs terres par la bande à Drogba, Zokora, Kalou.

2015, les Lions sont sortis dès le premier tour en terminant 3ème derrière le Ghana et l'Algérie. Giresse après l'échec déclara :"les Sénégalais ont une haute estime de leur football alors qu'ils n'ont jamais rien gagné". Il fut limogé par la suite et c'était la disgrâce des sorciers blancs au sein de l'opinion publique.
En 2017,débuta le magistère d'Aliou Cissé avec une ossature composée de joueurs du Sénégal Olympique dont il était coach adjoint pendant que Karim Séga Diouf était le titulaire, les Lions furent éliminés avec amertume en 1/4 de finales par les Camerounais d'Hugo Broos lors de cette Coupe d'Afrique.

Cette équipe remaniée et renforcée revient en 2019 pour accéder à la finale face à l'Algérie des Mahrez, Bounneja, Brahimi avec toujours Cissé sur le banc des Lions. Une génération qui pouvait nous faire oublier 2002 avec des joueurs de classe comme Kalidou Koulibaly, Sadio Mané, Cheikh Kouyaté, Gana Gueye, Edouard Mendy qui avaient fini de prendre leurs quartiers.

Ces noms font la fierté de plusieurs grands clubs européens et ont fini de redonner espoir à un Sénégal qui récidive en accédant à une deuxième finale consécutive à cette CAN 2022 trois ans après (la COVID 19 n'aura même pas épargné l'agenda du football).

Au vu de tout ce qui précède, il est indéniable que la finale qui nous opposera à l'Egypte en terre camerounaise est pleine de symboles et peut avec une victoire attendue par un peuple uni, essuyer des larmes qui ont beaucoup coulé sur nos joues pendant des décennies.

Voir un triomphe du Sénégal soulagerait les gens de ma génération qui ont tant rêvé du trophée sans le voir atterrir chez nous.

Sadio Mané et sa bande ont un moment unique pour écrire l'histoire et nous faire entrer dans l'Histoire.

Dimanche doit être un autre jour. Faites le pour nous. Pour l'éternité.