NETTALI.COM – Alors qu’il y a une vive polémique entre, notamment, le Parti démocratique sénégalais (Pds) et Rewmi, autour du statut du chef de l’opposition, Mouhamadou Ngouda Mboup, enseignant-chercheur en Droit public à l’université de Dakar, croit savoir que ce titre revient à Idrissa Seck.

Dans un entretien avec le journal « Le Quotidien » paru ce mardi, Mouhamadou Ngouda Mboup, interrogé sur le profil du chef de l’opposition, pense que « ce titre doit revenir à Idrissa Seck qui a été le second choix des Sénégalais à l’issue de l’élection présidentielle ».

Remontant la genèse de cette polémique, il explique : « A la suite du référendum du 7 janvier 2001 qui marque l’avènement de la 3ème République sénégalaise, l’opposition a acquis une place de choix dans la Constitution. Ce nouveau paradigme permet de préciser que les régimes ont évolué ».

« Maintenant, ajoute l’enseignant, on assiste à une séparation entre la majorité et l’opposition. La vision d’un gouvernement modéré théorisé par Montesquieu, qui permettait la liberté politique, a connu de nouvelles orientations. Un gouvernement modéré est celui qui accorde une place de choix à l’opposition et qui favorise l’alternance. Donc, l’article 58 de la Constitution de 2001 sur le statut de l’opposition est très symbolique, parce qu’il vient après le gouvernement du point de vue de la numérotation, du positionnement mais aussi de l’innovation ».

« A ce propos, il faut rappeler que l’opposition sénégalaise commence à avoir une assise institutionnelle. C’est pourquoi ce qui a été écrit en 2001 a été substantiellement enrichi en 2016. Avec les travaux de la Commission nationale de réforme des institutions, l’article 14 qui proposait une nouvelle Constitution a eu une nouvelle approche de la notion de l’opposition. Dans la rédaction initiale de la Constitution de 2001, à travers l’article 58, l’opposition qui devait porter ce statut, était l’opposition majoritairement représentée à l’Assemblée nationale », précise-t-il.

Avant de souligner : « Ace niveau, il y avait une conception arithmétique de l’opposition. C’était bien la minorité à l’Assemblée nationale qui constituait l’opposition et à qui revenait de droit ce statut. Avec les travaux de la Cnri, l’article 14 faisait sauter l’opposition parlementaire pour avoir une approche organique de l’opposition. Désormais, le statut de l’opposition puisé dans les travaux de la Cnri concerne l’opposition parlementaire et extra parlementaire. On est passé d’une conception arithmétique de l’opposition à une conception organique. Désormais la notion d’opposition trouve sa source et ses fondements dès l’article 4 de la Constitution, ce qui veut dire que ce statut pourrait même revenir à une entité indépendante ».

«  C’est un statut identifié et attaché à un leader. En gros, avant 2016, c’était très clair que le statut de l’opposition était lié au chef de la minorité parlementaire. Entretemps aussi, il s’est passé une chose très importante  : la suppression du poste de Premier ministre. Ce qui fait que les élections législatives ne sont plus des élections de décision mais de sélections de représentation. L’élection de décision, c’est la Présidentielle qui devient l’étalon de mesure pour jauger de la légitimité de celui qui doit être le chef de l’opposition », tranche-t-il la pomme de discorde.

Pour l’enseignant-chercheur, le titre de chef de l’opposition ne saurait revenir au Pds. « C’est impossible. En réalité, on ne parle pas de l’opposition parlementaire. Si ce statut devait revenir au Pds, on retournerait dans la conception arithmétique, alors que le constituant sénégalais a désormais une conception o r g a n i q u e . Constitutionnellement et techniquement, la Constitution a réglé le problème. Toutefois, ce statut de l’opposition pourrait faire l’objet de concertations. A la suite d’élections législatives, s’il y a de nouvelles forces en place, on pourrait réorganiser et dans le cadre de la notion de gentleman agreement, revenir à l’opposition qui a le plus de députés à l’Assemblée nationale. Le statut de l’opposition tel que formulé dans la Constitution ne rejette pas qu’il soit incarné par la minorité parlementaire. Mais de droit, la Constitution le confère au second choix à l’élection présidentielle », conclut-il.